mercredi 5 janvier 2011

Je suis malade


Il me soutient que je ne suis pas malade.
Il a regardé partout. Il a écouté ce qu'il y avait à écouter, il a palpé ce qu'il y avait à palper, il en déduit ce qui lui fait plaisir, ce qu'il a toujours cru de moi, et sans doute ce pour quoi il m'a épousée: que je suis une grande fille solide, une bonne fille aux joues rouges et au sang rapide, une de ces bonnes campagnardes à qui on peut donner de franches accolades, sa petite femme bien ancrée sur ces deux jambes, aux dents saines et à l'oeil vif.

Il me soutient, et même, ça le fait rire, que la mécanique est parfaitement huilée. Que j'en ai encore pour pas mal de kilomètres. Que je peux aller me dégourdir les jambes si j'ai l'impression d'étouffer, d'ailleurs il y a le marché ce matin, ça me ferait du bien de voir du monde et il a envie d'une bonne soupe comme je sais si bien les faire. Moi j'envoie sa mère, elle devrait encore bien s'en sortir toute seule. Je n'ai aucune envie de voir du monde. Je n'ai aucune envie de me dégourdir les jambes autour du pâté de maisons, voir toujours la même chose m'est insupportable, alors autant rester ici, derrière cet ordinateur.

Comment est-ce qu'il peut savoir, que je ne suis pas en train de m'effriter à l'intérieur de moi? Je sais que j'ai quelque chose, même si c'est invisible, même s'il est trop incompétent pour s'en rendre compte. Un grand trou noir, qui progressivement prend toute la place et qui m'empêche de respirer.


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